Les projets résidentiels sont significatifs dans la vie des ménages québécois. L’achat d’une propriété constitue une part significative de leur budget et vient en quelque sorte structurer un champ des possibles à l’égard de l’accès aux ressources territoriales (services, commerces, éducation, emploi, loisirs, etc.) (Meloche, 2015). L’achat d’une propriété, quelle que soit la typologie de logement, s’inscrit dans des temps longs et implique l’enjeu de faire de « bons » choix. Les ménages d’acheteurs construisent leurs choix résidentiels selon des stratégies qui s’articulent selon différents critères (Authier, Bonvalet, Lévy, 2010). Ceux-ci seront liés aux coûts et aux disponibilités des biens immobiliers (prix, localisation, typologies, statut d’occupation, etc.). Ils sont aussi, entre autres, liés aux caractéristiques démographiques du ménage (taille, présence d’enfants, d’adolescents, etc.), leurs positions dans les cycles de vie (professionnels, retraités, aînés, etc.), leurs préférences (mobilité, accessibilité, aménités urbaines, cadre naturel, etc.) ou leurs aspirations (accession à la propriété, secteurs de prestige, rendement des investissements, etc.). Les stratégies qu’articulent les ménages sont complexes et évoluent dans le temps selon le ménage lui-même, et selon les changements urbains (infrastructures, projets urbains, changements démographiques, services disponibles, etc.). Ainsi, les connaissances théoriques sont relativement claires sur une notion générale de stratégie résidentielle. Mais celles-ci comportent une large part d’inconnu ou d’éléments variables et relatifs.
Les études de satisfaction résidentielle (Amérigo et Aragonés 1997) permettent d’explorer la mobilité résidentielle, la transformation de l’environnement résidentiel et le développement de processus cognitifs dont la modification des aspirations. L’analyse des modes/styles de vie (Thomas 2013), quant à elle, constitue une approche originale pour interroger plus la satisfaction résidentielle, en prenant en compte les transformations des ménages. Cette approche, développée à la fin des années 1970 et utilisée pour segmenter des marchés de biens et de services, permettent de prendre en compte à la fois les comportements et leurs significations. Par exemple, dans les choix de transport, cette approche montre que les modes/styles de vie sont plus déterminants que les variables socio-économiques. Thomas (2013, 2015) en Suisse ou Lord au Québec (2016, 2020) ont appliqué ces concepts aux choix résidentiels. Du point de vue de l’aménagement, mieux comprendre ces dynamiques des ménages s’avère primordial pour la planification urbaine, en témoignent les tensions actuelles sur le marché de l’achat ou de la location, la densification décousue des banlieues ou le développement mal planifié de résidences pour aînés. Du point de vue des ménages, supporter leurs parcours ressort également comme une donnée primordiale, où le courtier immobilier dispose souvent de peu d’information pour permettre de faire des choix éclairés et remplir sa mission de conseil. Cette même mission place aussi cet acteur dans une position stratégique capable, avec la disposition d’un outil de compréhension des modes/styles de vie, de conseiller à la fois promoteurs, développeurs et décideurs publics impliqués dans la création de l’offre de logements. L’objectif du projet est de poser les bases théorique et méthodologique pour la création d’un outil de compréhension des choix résidentiels par les modes de vie au Québec.
Ce projet pilote qui s’articule en 2 temps dans la RMR de Québec. L’agence mettra à disposition les données issues d’un questionnaire de satisfaction des clients (occupants) suivant des transactions immobilières dans la région de Québec. Étapes du projet : 1) Analyses des transactions immobilières 2016-2022 où les caractéristiques des i) biens immobiliers, ii) clients et iii) environnements urbains concernés seront réalisées. Une typologie de transactions sera créée sur la base de ces trois critères. 2) Création d’un échantillon de clients volontaires et réalisation d’entretiens semi-directifs (n=15 à 25) avec des représentants de chacun de types de transactions. Les entretiens permettront d’approfondir les processus des choix résidentiels, les informations prises en compte pré-achat et l’appréciation post-achat. 3) Analyse des modes/styles de vie sera pour : i) ajout d’un module de questions dans une nouvelle version du questionnaire client et ii) poser les bases pour une enquête plus large à Montréal et Québec couvrant près de 60% du Québec urbain.